lundi 14 janvier 2008

Issa Aït Belize, des lettres au Couchant

Je suis né en 1954, dans les environs de Nador, au Maroc. A cette époque et dans cette petite ville du Nord, les livres ne sont pas nombreux. Mes frères, qui étudient en Espagne, en rapportent des livres qui vont alimenter mes premiers rêves ibériques. C'est au lycée Gouraud, rebaptisé Hassan II, à Rabat, que je découvre la littérature française : Victor Hugo, Molière, Rousseau, Voltaire, Giono, Genet, Camus... m'accompagnent pendant tout le secondaire, une période où la lecture me pétrit. J'avais franchi le détroit; voilà que je passe les Pyrénées.
A l'heure de poursuivre mes études supérieures, je pousse encore un peu plus loin pour me poser sur un confetti qui va coller à mes semelles - et à mon coeur - pendant 35 ans et qui sait combien à venir; la Belgique, c'est à la fois les tribulations de l'immigré, la liberté de penser autrement, la diversité des lectures et l'amour d'une vie. Sur le plan culturel et artistique, j'y découvre des hommes et des femmes habités par de magistrales créations, un foisonnement de tons, de formes, une fantaisie chatoyante, une capacité à rire de soi bonne pour la santé. Quand ma fenêtre encadre, jour après jour, le fond gris blanc des vapeurs glacées qui voilent ma vallée, il me prend l'envie d'exposer des couleurs, de visiter d'autres vies, des terroirs et des destins. Des souvenirs, des idées en pagaille se disputent sous mon crâne. Il est temps d'écrire... Catharsis !


Les romans :

La Chronique du pou vert (307 p., Luce Wilquin éditions, Avin - Belgique, 2001)
Dans la décharge publique d'une petite cité marocaine, l'ange de la mort, victime d'une déprime, désobéit à l'ordre céleste en sauvant un nouveau-né abandonné entre les détritus. Une multitude de personnages se croisent dans une atmosphère digne de Sodome et Gomorrhe à l'odeur nauséabonde : juge, imam, mystique, responsables politiques, militaires américains, directeur de prison nostalgique de l'administration franquiste, cancéreux de retour de cure, femmes de tempérament, fous, chiens, mouches qui se prennent pour des faucons, un inquiétant serpent pressé de mettre son grain de sel dans les événements... et enfin des poux qui traversent en sarabande ce conte à la frontière de la satire et du fantastique.

Nounja à la folie… (176 p., Luce Wilquin éditions, Avin - Belgique, 2003)
ou la folie, la déraison, vue à travers les yeux de deux enfants qui essaient d’en percer le mystère en menant une enquête pendant les grandes vacances ; ils jettent leur dévolu sur l’un de ces hères qui parcourent les rues en marmonnant. Berbères, comme l’auteur, les deux enquêteurs en herbe vivent au début des années soixante dans une petite ville du Rif méditerranéen, encore fort influencée par la récente occupation espagnole… La majorité des éléments de ce récit sont authentiques (personnages, lieux décrits, événements…), sauf l’essentiel : la trame de l’histoire.

Le fils du péché :
1. Racines et épines (326 p., Luce Wilquin éditions, Avin - Belgique, 2005)
2. Noces sarrasines (380 p., Luce Wilquin éditions, Avin - Belgique, 2006)
3. Calendes maghrébines (317 p., Luce Wilquin éditions, Avin - Belgique,
mars 2008)
Ce roman en trois tomes mène Amarouche, petit Berbère pauvre, de l'enfance entachée par l'absence du père jusqu'à l'âge adulte, celui du deuil, de la pacification et d'un modeste espoir, celui aussi où le Maroc referme une porte sur une pièce de son histoire. La quête d'Amarouche est celle de ses valeurs, de sa vérité, de sa dignité. Il va plonger la cuillère dans bien des potages culturels et spirituels, allant de l'enseignement du Coran dans la petite mosquée de son quartier du Poblado, passant par les moeurs du souk où il gagne sa vie à peine entamée, jusqu'à une formation commerciale dans une école supérieure à Liège, en Belgique. Dans sa besace, les souvenirs de Nador - la matrice -, la lumière des grandes cités marocaines, les pluies qui arrosent le bassin sidérurgique liégeois et le vent salé du golfe de Gascogne. Ses compagnons de banquet, de voyage : sa mère, un vieux fquih grincheux, les copains du souk, un sergent retraité de l'armée franquiste qui élève ses poules comme on dresse les soldats, un curé basque qui soigne les bleus à l'âme, qu'elle soit espagnole ou rifaine, sa famille maternelle que la mort d'un aïeul va lui permettre de connaître, les soubresauts amoureux, ceux, historiques, de sa ville. Tous ces ingrédients qui vont faire de lui un homme et lui donner une identité, enfin.



Appelez-moi Sam (66 p., Averbode, col. "7 en poche" - février 2008)
"Il est des événements inoubliables, et parmi ceux-ci, il en est d’inclassables, surtout quand on est encore enfant et qu’on a l’occasion d’accompagner papa au commissariat… Quel âge avais-je alors, quand, cet après-midi d’un mercredi, nous avons affronté le mauvais temps pour répondre à la convocation de la police du petit village où nous vivions tous, je veux parler de mes parents et de ceux de maman ?"
Le papa de Christina a décidé de demander la nationalité belge. « Pour la petite » comme dit sa femme. Il ne pensait pas que ce serait un tel parcours du combattant. Des années plus tard, la « petite » a grandi et elle s’est installée en Espagne, où elle a rencontré son amoureux tchétchène. Suite à l’ouverture d’un testament, Christina part sur les traces de ce père disparu trop tôt, bien avant d’avoir pu lui parler de ses origines et de sa religion.

Et aussi :
  • Participation à un ouvrage collectif : "11 septembre 2001 – 11 septembre 2002, Rompre le silence, Une prise de position citoyenne d’intellectuels belges d’origine maghrébine sur les événements qui ont marqué l’année" , dirigé par le sociologue Hassan Bousetta, paru aux Editions Labor, Bruxelles 2002. Traduit en Néerlandais et paru à la VUBPRESS, 2003.
  • Gierik & Nieuw Vlaams Tijdschrift, nr 77 – winter 2002 – traduction et publication d'une nouvelle : "Een wezen van licht ", de la p.52 à 61. Traduction : M. Guy Commerman.
  • Gierik & Nieuw Vlaams Tijdschrift, nr 83 – 2004 : 3 poèmes : Waarover droomde je ? Mijn zommeravonden in het Rifgebergte, als we onze tranen zullen drogen… de la p. 98 à 102. Traduction : M. Guy Commerman.
  • Pour la ville de Mons, à l'occasion des 8èmes rendez-vous du Livre 2008, publication d'une nouvelle : "Le Miracle du 9, rue de la Clef"